Galerie Aux Docks d’Arles. Du 26 août au 12 septembre.

Après le peintre cubain Luis Ramondi Gomez que les Docks d’Arles ont accompagné et exposé pour la première fois en France en 2019, nous présentons cette année les photographies d’archives d’Una Liutkus. Celles-ci sont limitées volontairement à son premier voyage en 1964 à la découverte de la révolution cubaine. Fidel Castro apparaît alors pour une partie de la jeunesse occidentale comme une figure de la liberté et de la lutte révolutionnaire.

L’auteur raconte les circonstances de ce premier voyage : une annonce du journal communiste Clarté, édité à Paris, proposant un séjour de découverte de la Révolution, la composition d’un groupe hétéroclite d’étudiants, le long parcours pour rejoindre finalement La Havane.
Dans ce groupe on rencontre des personnalités comme Bernard Kouchner, Michel Remacle et Michel Fennetaux (alors dirigeants de L’Union des étudiants communistes UEC), mais aussi les sœurs évelyne et Marie-France Pisier.

Il s’agissait du premier voyage d’un groupe d’étudiants européens dans l’île et l’accueil par les autorités cubaines dépassa les espérances de chacun. Dès les premiers jours, un contact privilégié s’est instauré avec Fidel Castro et son entourage, une relation particulière s’est nouée.

C’est ainsi qu’Una Liutkus a pu assister à Santiago de Cuba le 26 juillet, depuis la tribune d’honneur place de la Révolution, au discours fleuve du « Comandante en Jefe ». Au côté de Fidel Castro on peut voir notamment Raul Castro, son épouse Vilma Espin et Che Guevara, .

Una Liutkus a réalisé de nombreuses photographies durant ce séjour, de la vie quotidienne à La Havane à une partie de pêche en mer avec Fidel Castro. Elles ont été réalisées avec un matériel non professionnel et n’ont pas de prétention artistique. Il s’agit d’un témoignage qui nous replonge 57 ans après dans les premières années de la Révolution cubaine, dans l’intimité aussi de certains de ses dirigeants, dans celle du groupe d’étudiants. Elles nous montrent un pays en pleine transformation, des populations enthousiastes qui croient aux « lendemains qui chantent ».

 

Una Liutkus est français, d’origine lituanienne mais aussi cubain de cœur ! Après ce premier voyage, il est retourné à Cuba où il s’est marié et y a vécu pas mal d’années exerçant plusieurs métiers puis a créé et dirigé à Paris le Tour operateur Havana Tour.

« Jamais je n’aurai imaginé que ces photos qui ont bientôt 60 ans seraient un jour exposées ».

Tel est le nom choisi pour cette série photographique totalement inédite montrée à Arles. Una Liutkus et ses amis se sont connus sur les bancs de la Fac de Droit à Nice. De cette amitié est né le projet d’un voyage à Cuba pour découvrir la « Revolución ». Lors de l’été 1964, ils ont la chance de réaliser leur projet et bien au-delà de leurs rêves : les vies de chacun d’eux seront bouleversées par cette belle aventure. Ils ont la chance de rencontrer le mythique Fidel Castro et de partager nombre de rencontres avec lui. Pour notre plus grande chance, Una saisit les fragments de leur histoire à Cuba avec son appareil photo.

Après la victoire des barbudos en 1959, ils sont les premiers jeunes français à visiter Santiago de Cuba, Camaguey, Trinidad et bien sûr La Havane… Le jeune photographe immortalise des portraits, des moments, des réunions, des regards, des détails de rues. On retrouvera les symboles qui caractérisent cette époque de la révolution cubaine mais surtout leurs moments uniques.

Né en France avant-guerre, de parents lituaniens, Una Liutkus a grandi à Nice et reste très attaché à la culture niçoise. Après un diplôme d’hôtellerie, il passe une Licence en Droit public, tout en travaillant comme barman puis il « monte à Paris faire » Sciences-Po. Après l’obtention de son diplôme, c’est le voyage à Cuba la révolutionnaire. Avant le départ Il achète son premier appareil photo (un simple Voigtländer !). Sa découverte de Cuba lui ouvre de nouveaux horizons, il y commencera une carrière de grand voyageur qui le conduira à travailler pendant près de cinquante ans comme agent de voyages. Ses intérêts sont multiples, son tempérament cosmopolite. Son travail photographique nous renvoie à notre rapport aux autres et au temps qui passe, dans le monde plein de contradictions qui nous entoure.

Il est difficile de résumer cette série CUBA SI 64 en quelques mots car elle tient à la fois du reportage et de la photo d’auteur. Una porte un regard sincère sur la vie qui l’entoure en photographiant ce qu’il voit sur le vif. Mais Una n’est pas un paparazzi. Fidel Castro le regarde dans les yeux et on voit bien qu’aucune photo n’est volée. De même ses amies de Nice, les sœurs évelyne et Marie France Pisier, Jean-Pierre Osenda ou encore Bernard Kouchner et les autres membres du groupe savent que Una les photographie. Empreinte d’humanisme, cette série nous fait ressentir toute la dignité dont sont habités les sujets qu’il photographie. Finement composées, toujours avec discrétion, ses images font preuve d’une étonnante capacité à s’émerveiller sans cesse de son environnement : Cuba. Car si son univers photographique s’est peu à peu étendu bien au-delà du crocodile vert, le travail de Una Liutkus est indissociable de Cuba. S’éloignant du reportage, il réussit dans ces extraits de vie, à capter l’essence d’un pays et d’une période historique et à nous donner une bouffée d’émotion et un peu d’air pur où se perpétuent l’authenticité et l’unité d’un peuple.

Dominique Passos

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